Writober 21 – Sommeil
Elle déclara forfait. Cela faisait une heure qu’elle tournait et se retournait dans son lit, sans résultat.
Une heure qu’elle tergiversait avec elle-même, inspirée par le silence et la quiétude de la nuit.
« Comment je vais m’habiller demain ? Il va faire beau ? Froid ? J’ai quoi comme réunion déjà ? Ah oui, la énième réunion sur le sujet qui n’avance pas-mais-qui-est-stratégique-on-attend-beaucoup-de-toi-tu-sais-sur-ce- dossier. Alors : robe noire avec veste rouge et talons. Working-girl. L’habit fait définitivement le moine.
Han ! J’ai bien mis à jour mes slides ? Il faut que j’arrive à régler ces histoires de paramètres d’affichage, à chaque fois je passe pour une buse avec mon partage d’écran. Il faut que je vire ma photo de fond d’écran déjà, ça m’évitera les réflexions. Elles sont belles mes filles, mais c’est un peu mièvre. Prévoir aussi de me caler une séance de cohérence cardiaque avant la réunion. Il faut que j’évite de montrer que je suis impressionnée. Je vais me créer un rappel sur le téléphone. Ah non, je vais le réveiller. Tant pis, je verrai ça plus tard.
Elle repassa son discours mentalement.
Ah mais oui, c’est ça le terme que je cherchais l’autre jour ! Ce sera bien mieux que ce terme franglais qu’ils utilisent tous. Vais-je m’en souvenir demain matin ? Encore une fois, je devrais me le noter. Ou trouver un moyen mnémotechnique. La relevance court à sa pert…inence. Ah ouais ! Trop bien !
Elle se retourna dans le lit et regarda son homme qui dormait profondément mais bruyamment. Elle surveilla sa respiration, guettant des signes d’apnée du sommeil.
Comment fait-il pour aussi bien dormir alors que je n’arrête pas de gigoter à côté ? Ce n’est pas comme s’il s’inquiétait de quoi que ce soit. C’est injuste d’aussi bien dormir ! C’est sûr, à force de ne pas partager la charge mentale, c’est moi qui ne dors pas. En plus il m’empêche de me rendormir en ronflant autant. Comment il fait pour ne pas être réveillé par tout ce bruit, sans compter les vibrations que ça doit générer dans la gorge!
Allez, arrête de t’énerver, il n’y est pour rien si tu ne dors pas.
Ah, mais il pourrait peut-être m’aider à me rendormir si jamais il se réveillait lui aussi et qu’on s’épuise un peu sous la couette ! Je le réveille ? Il a l’air de si bien dormir. Si je l’effleure là ? Non, il dort trop bien. Bon, je vais devoir passer au plan B.
Sans bruit, elle prit son livre et son téléphone/lampe de poche et sortit sur la pointe des pieds de la chambre pour gagner le salon. Elle s’installa sur le canapé, alluma une petite lampe à l’éclairage tamisé, et s’installa sous une couverture douillette.
Evidemment, alors qu’elle peinait à lire les autres jours ce roman dans lequel il ne se passait pas grand chose, voilà que l’intrigue se complexifiait et que cela devenait intéressant. Total, son insomnie dura deux heures.
Elle n’attendit pas que le sommeil la gagnât de nouveau et s’arrêta à la fin du chapitre. Elle rejoignit le lit et sa place qui s’est rafraichie. Elle tourna une fois, se retourna. Elle trouva sa position, recroquevillée sur elle-même, le lit et les draps avaient atteint la bonne température. Ses pensées lui échappèrent, son souffle ralentit.
Soudain: « Maman ! Je ne retrouve plus doudou ! »
Ce texte s’inscrit dans une série qui s’alimentera au cours du mois d’octobre, en lien avec un détournement de Inktober. Le détournement est une idée de Kozlika : au lieu d’un dessin par jour, ce sera un texte inspiré par le mot du jour
4 commentaires
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Elle étrangla… doudou ?
J’aime beaucoup !
Et je me reconnait tout à fait dans… le dormeur 😉
Le final aussi, ça sent le vécu 😉
@lolo: left eye closed, right eye open.
@Pablo: oui, le manque de sommeil peut mener à des actes inconsidérés!
@Gilsoub: cette histoire de doudou perdu, ça ne s’invente pas, ça se subit! 🙂