Writober 27 – Musique
Elles trouvèrent vite l’appartement grâce à la résonance des basses qu’elles suivirent.
La musique était forte mais le son était léché, les enceintes devaient être de bonne qualité. Personne ne les accueillit vraiment, elles pénétrèrent dans une entrée déjà encombrée de convives qui discutaient malgré le volume sonore. Les verres circulaient. Parfois un gobelet rempli ou non s’élevait au-dessus des têtes pour suivre son chemin allant ou venant au ravitaillement.
Christelle était moins jolie que ce que Magali lui avait décrit. Mais elle avait un putain de charme. Une confiance en elle, à la limite de l’arrogance, un regard franc, curieux, rieur, provocateur par moments. Elle se sentait envoûtée par elle. Elles tombèrent enfin sur Sébastien, leur hôte, qui semblait assez désemparé par les nombreuses demandes dont il était assailli. Un petit regard furtif sur son décolleté, et Sébastien retrouva son sens de l’hospitalité.
Magali les laissa vite au profit d’autres connaissances et envies de conquêtes. Sébastien revint très vite avec trois gobelets de punch planteur. Ils trinquèrent aux nouvelles rencontres. Ils échangèrent quelques banalités sur comment ils avaient connu Magali, la taille de l’appartement. Christelle était très à l’aise et savait mener la conversation avec l’un ou l’autre.
Puis un air connu surgit de la playlist. On demanda à augmenter le volume. Elle en profita pour entraîner Christelle à danser, loin de Sébastien. Christelle aimait danser, elles s’amusèrent de leurs initiatives chorégraphiques. De plus en plus de monde autour d’elles se mit à danser, encombrant l’espace. Pour ne pas contraindre leur mouvements, elles se rapprochèrent. Leur jeu se changea en un jeu de séduction, leur danse se fit plus suave, les mouvements plus langoureux, les regards plus suggestifs.
Alors que la tension montait fort agréablement, Sébastien les rejoignit. Il capta immédiatement le sujet de leur complicité et entra dans leur jeu, en se rapprochant de l’une puis de l’autre. Et de l’autre, et encore de l’autre. Visiblement Christelle ne l’intéressait pas trop. Quel pot de colle lourdaud se plaignit-elle. L’intrusion ne semblait pas gêner Christelle qui s’en amusait, même, en se collant au dos de Sébastien et se calant à ses mouvements.
Telle une girouette, Sébastien saisit l’opportunité et entra en résonance avec les déhanchements de Christelle. Elle n’existait plus ni pour l’un ni pour l’autre. Elle tenta de capter à nouveau le regard de Christelle, de s’immiscer et reprendre la situation en main. En vain. Ils allaient beaucoup plus loin que ce qu’elle avait pu atteindre avec Christelle quelques minutes auparavant.
La musique devenait assourdissante, elle se faisait bousculer par les autres danseurs, l’un d’eux avait même renversé quelques gouttes de bière sur ses bas. Il s’excusa en riant et commença à l’enlacer. « Je sais comment me faire pardonner » lui ânonna-t-il a l’oreille. Cette soirée tournait au cauchemar. Elle entrevit Magali très occupée avec un des invités, ils allaient bientôt rouler sous le canapé.
Enfin dehors, elle laissa aller quelques larmes. Dans le métro qui la ramenait chez elle, elle écouta Angèle. » Tu voudrais qu’elle soit ta reine ce soir »… Ce soir, comme beaucoup d’autres soirs, sa reine était celle d’un autre.
Ce texte s’inscrit dans une série qui s’alimentera au cours du mois d’octobre, en lien avec un détournement de Inktober. Le détournement est une idée de Kozlika : au lieu d’un dessin par jour, ce sera un texte inspiré par le mot du jour