Trouver l’amour ou la mort
En exclusivité pour notre journal, Cupidon75 (pour des raisons évidentes il n’a pas souhaité dévoilé son identité) a accepté de nous livrer son témoignage glaçant. Vous ne verrez plus les sites de rencontre de la même façon, et les célibataires en mal de relations humaines ont un souci de plus à se faire.
Qui ne s’est pas un jour posé la question avant de faire connaissance avec son « match » des risques pris à rencontrer un ou une tordue ? Les personnes qui ont croisé le chemin de Cupidon75 ne sont plus là pour nous partager leurs impressions et leurs conseils.
Cupidon75 a commis au moins trois crimes en rencontrant ses victimes sur Tinder. Quelles étaient ses motivations ? Quelle était sa stratégie ? Comment a-t-il gagné la confiance de ses victimes ? Nous lui avons adressé ces questions à travers une interview exclusive qu’il nous a accordée.
» Cupidon75, nous sommes deux journalistes, homme et femme, et avons chacun à un moment de notre vie passé du temps sur des sites de rencontre. Nous sommes curieux de connaître les raisons qui vous ont poussé à tuer vos victimes et surtout de la façon dont vous les avez abordées, gagné leur confiance. Au-delà de notre curiosité quasi scientifique sur la nature humaine et les rapports entre les individus dans notre société connectée, nous souhaitons également mettre en garde les utilisateurs de ces sites.
– Je comprends votre démarche et sachez que je vous répondrai avec la plus grande honnêteté. Je suis heureux que vous me donniez la parole, même écrite (Nous n’avons pas pu échanger directement avec lui, même par téléphone pour des raisons de sécurité – Note de la rédaction), car je tiens à faire connaître mon histoire et ma version des faits.
– Merci de ce préambule. Racontez-nous votre première fois. Votre première rencontre de celle qui sera votre première victime.
– Mes souvenirs sont assez précis, même si je n’ai pas gardé la trace de nos premiers échanges. C’est elle qui m’a contacté. Elle ne faisait pas partie des personnes que j’avais sélectionnées. Cela faisait des années que j’étais inscrit, j’avais fait des rencontres, la plupart étaient restées sans suite, quelques unes avaient donné lieu à des relations plus ou moins longues. Lorsque Célia m’a envoyé un message, ma précédente relation s’était terminée depuis un petit moment, j’étais de nouveau disponible dans ma tête et dans mon cœur, mais je n’attendais rien de particulier. J’étais libre, ouvert à tout type de rencontre (coup d’un soir ou plus long terme), j’étais disposé à accueillir ce que la vie avait à m’offrir, en l’occurrence Célia, une jolie brunette dans la trentaine qui m’abordait directement. Son message et sa démarche m’ont séduit d’emblée. Son profil dégageait quelque chose de frais, de pétillant, on avait envie de connaître cette Célia.
– Aviez-vous envie de la tuer à ce moment-là ?
– Non, pas du tout ! Mais vous allez trop vite ! Laissez-moi raconter ! Célia était effectivement vive, enjouée, intelligente, cultivée, elle avait fait des études supérieures. Nous avions des goûts assez différents et il était intéressant d’échanger nos points de vue, nos coups de cœur littéraires, cinématographiques, théâtraux etc. Nous nous sommes rencontrés la première fois pour une exposition. Nous avons partagé nos impressions, échangé nos points de vue, avec beaucoup d’ouverture d’esprit de sa part, c’était vraiment très enrichissant. Nous sommes ensuite naturellement allés dîner dans un restaurant proche du lieu de l’exposition. Nous avons abordé nos vies personnelles. Elle sortait d’une longue relation dans laquelle elle s’était beaucoup investie, sans beaucoup de considération en retour. Elle avait beaucoup souffert et semblait en souffrir encore même si elle se disait prête pour une nouvelle relation. Elle avait passé quelques mois à papillonner, avait envie de se poser, d’être amoureuse de nouveau. Le courant est passé facilement et immédiatement, y compris sexuellement. Nous nous sommes revus de nombreuses fois, nous en avions envie tous les deux, on ne se quittait presque plus. Elle est tombée amoureuse de moi. Mais je n’étais pas amoureux d’elle. Cela a entaché notre relation qui s’est alourdie de disputes, de pleurs, je la faisais souffrir. Elle n’avait pas d’amis auprès de qui prendre conseil ou épancher sa peine. Elle n’avait que moi. C’était très lourd pour moi et c’était surtout très triste pour elle qu’elle soit si seule. Elle n’avait pas de famille: ses parents et son frère avaient disparu dans un accident d’avion, elle n’avait pas pu les accompagner car elle avait la varicelle et ne pouvait voyager. Elle n’avait pas non plus de cousins ou cousines de son âge. Elle n’avait donc que moi. Je l’ai encouragée à sortir avec des collègues, de s’inscrire à des activités qui favorisent les rencontres autres qu’amoureuses, mais elle a pris mes initiatives comme une façon de la rejeter. Ce qui était à moitié vrai. J’avais de la peine pour elle et j’étouffais. Malgré tout, elle suivit mes conseils et parvint à participer à des moments de convivialité sans moi. Elle les subissait plutôt qu’autre chose et échoua dans l’entreprise de se créer un cercle de connaissances avec qui se divertir.
En parallèle, j’avais été contacté par une autre femme dont le profil stipulait qu’elle était à la recherche d’un coup d’un soir. C’était une femme mariée, frustrée sexuellement qui allait s’éclater ailleurs pour maintenir son couple.
– Catherine, c’est cela ?
– Non, pas du tout. La femme dont je parle, je ne l’ai pas tuée. En revanche nous avons honoré sa demande et Célia l’a su. Cela l’a dévastée. Je n’avais pas idée à quel point elle pouvait sombrer, être négative, se négliger, se dévaloriser. C’était affreux à voir. Malgré la peine que je lui avait infligée – involontairement je précise-, elle fit d’incommensurables efforts pour surmonter sa tristesse et redevint la Célia que j’avais rencontrée. Je n’en étais toujours pas amoureux. Je savais que je ne le serai jamais. Alors j’ai mis fin à ses souffrances à venir.
– Mais pourquoi ne pas l’avoir quittée et lui laisser une chance de rencontrer de nouveau quelqu’un ?
– Tout simplement parce qu’elle allait difficilement trouver quelqu’un au moins aussi bien que moi, et que même si elle rencontrait quelqu’un elle reproduirait le même schéma et allait souffrir toute sa vie et finirait par se suicider, ou louper ses tentatives de suicide. Je l’ai aidée en quelque sorte. »
Retrouvez la suite de notre interview exclusive dans notre prochain numéro.
Un commentaire sur “Trouver l’amour ou la mort”
Très très bon ! Ca change de d’habitude en plus.